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Disques de Rave

Lake – The World Is Real

Il est 23h30, tu as fait des pâtes et tu viens de réaliser que ton coloc' a consommé ta sauce bolonaise buitoni cachée sous le congélateur ? Pas de souci, écoute la dernière livraison de Lake et respire. Plus naturistes que bucoliques, Ashley Eriksson et Eli Moore nous ont concocté un album aux petits oignons fris qui te donnera envie de te refaire l'intégrale de Fleetwood Mac et même, en écoutant "I Wish For You", les Beach Boys. You-pi. Aussi nerveux qu'un Mazzy Star et confortable qu'un Steely Dan, cet LP te donnera envie de repeindre ta chambre en orange et de te mettre au footgolf avec Paul McCartney. Si vous avez peu de temps, écoutez en priorité "Combat Culture", vous saurez tout de suite si vous accrochez. Le monde est-il réel ? Woody Allen répondait que si ce n'était pas le cas, alors "il avait payé sa moquette beaucoup trop cher". Mais Dieu merci, le monde est réel et il reste du Ketchup dans le frigo. Tout va bien. (FV)

Glasser – Interiors

Votre peau est un peu sèche. Nous nous asseyons sur le rebord de la baignoire, face au lavabo. Glasser est encore plus performant qu'une crème nivéa. Si nous ne sommes pas tellement adeptes des morceaux de filles comme Lana Del Rey ou Adèle, il existe les beaux albums comme Interiors. Même si ça me donne envie de passer du temps dans ce cocon magnifique avec elles, et ainsi de faire des activités lentes et paresseuses, je sors de la salle de bain. Un risque est dans la rue piétonne.

En descendant les escaliers, tout bas, je dis que j'aimerais retomber amoureuse. Exposure m'a permis d'avoir assez d'énergie pour enfiler mes boots rouges. Le produit moelleux n'est pas encore sec, mes pieds glissent de droite à gauche. J'entends les filles criaient au loin "Qui vas-tu chercher ? Ce n'est pas l'heure d'aller se marier !" Puis ma deuxième jambe n'est même pas encore épilée. Sauf que tout me parait superficiel. Je suis partie gonfler mes poumons de vaillance pour que je découvre enfin ce que c’est que de se faire lécher la rate sur Glasser. "Je pars, je dois aller faire glisser mon cœur de droite à gauche mes dames, la crème dont j'ai besoin n'est pas dans l'appart".

Aujourd'hui, je crois encore que je laisserai faire celui qui porte de beaux slips blancs. Mais le risque de la rue piétonne n'en a pas. Je ne suis plus sûre alors. Le courage a glissé sur les marches. Je remonte les escaliers, pas très bravoure. Glasser ne termine pas sur une bonne note, il est vrai que je n'ai trouvé encore personne à aimer. Peut-être qu'il est préférable de remettre Interiors au début. Je regarderai les gens d’en-haut en tenant une tasse de thé. Les mélodies sont douces, tendres et passionnées. Ou je jetterai mon eau chaude sur les gens en bas si je m'ennuie parce que les autres morceaux sont solennels et lointains. C'est pour prendre des risques artificiels.

Mon bonheur est dans cette salle de bain. Elles rient, elles hurlent des paroles françaises et ne me jugent jamais. Après tout, j'ai pas trop fauté. A part être une poule mouillée, aux pieds trempés. (SA)

Born Gold – I Am An Exit

Il y’a des plaisirs qu’on voudrait partager, et des plaisirs qu’il faut savourer avec parcimonie. Le nouvel album est cet impossible, de prendre son temps on a le temps, mais on court avec une paire de ciseaux ouverte en travers de la bouche et on ne s’exprime plus qu’avec le vocoder implanté directement dans la glotte. On est né dans le futur. On est fait. Born Gold c’est Black Eyed Peas s’ils avaient un cœur, une sensibilité, une définition de l’art, et last-but-not-least une cervelle. On se met bien. Et même si la plupart de mes potes ne feront jamais la différence, je vois le bien et je sais voir le mal. La pop n’a jamais été aussi transie, transe, et même s’il s’agit d’un concept virtuel qui fait bien sur la toile, j’ai l’intime conviction de tenir un cri du cœur, un truc bâti honnêtement pour l’humanité aussi virtuelle soit-elle. Peut-être que je me plante, mais je fais l’autruche jusqu’à ce que l’album se termine et que je puisse aller faire autre chose. Me doucher par exemple. M’acheter une pizza, préchauffer le four, et attendre en me faisant reluire le cuir. Manger ma pizza, et m’endormir, baver sur le cuir et rêver de toi psychédéliquement, simplement. Encore une fois. Je suis piégé. Je te faisais confiance. (CL)

Ryan Hemsworth – Guilt Trips

Parfois, ce qui est d'obédiance Trip-hop finit par se perdre dans les méandres du douteux et du bavassage (Archive). Parfois, un retour essentiel à l'essence de cette musique fleurit, sorti d’on ne sait où, et là, pour le coup, il faut encourager Ryan. Ça n'a pas toujours été facile pour Ryan. Le joyau de cet opus est bien  "Ryan must be destroyed", avec sa mélodie mi-infantile, mi-trisomique. Pas leaule. La voix humaine samplée semble tout droit dénichée d'un épisode d'Agence Tous Risques, celui où Barracuda marche volontairement sur le pied de Looping, lequel pousse un cri. L'impression d'inquiétante étrangeté poursuit son chemin avec des morceaux comme "Weird Life" mais contraste avec l'autre versant de l'album, virant plus sur des terres défrichées par le "You took your time" de Mount Kimbie. Ici, Ryan donne le meilleur, come on Ryan, et signe avec "Day/Night/Sleep System" un véritable classique sous tension zéro, hip-hop-phonique ;  "Against A Wall", quant à lui, explore encore cette veine, mais sous son aspect électro. Il faut soutenir Ryan, les gars, et aller prendre un bain de minuit avec lui à Bristol, sous les auspices de Portishead et Massive Attack. Ça lui passera d'intituler, par exemple, ses chansons "Yaeko Mitamura is Lonely" ou "So Cold". Il faut être sympa avec Ryan. Quand il va mieux, il nous gratifie d'un magnifique et lunaire "Happiness and Dreams Forever", tout en syncope douce telle la ligne 11 du métro Parisien, ou encore le Nord de la Victoria Line à Londres. L'électro onirique et urbaine de Ryan Hemsworth donne encore cette fois toute l'étendue de son talent lorsque, sur le track 09, Tinashe vient nous caresser vocalement de son flow r'n'b. Il faut remercier Ryan, "Guilt Trips" est un album en forme de voyage que nous n'aurons aucune honte à écouter, au moins jusqu'à la fin de l'hiver 2014, plantés derrière une fenêtre à regarder tomber la neige. (FV)

Tropic Of Cancer – Restless Idylls

L'air froid. Les feuilles et les cheveux qui tombent. Tout près de mes genoux blancs, il y a une flaque rose bonbon. J'ai envie de m'allonger sur ce fake PVC. C'est hyper doux mais glissant, impalpable. Comme Tropic Of Cancer, qui me donne un coup de Manchester sur le coin de l'arcade en automne noir. J'aime les morceaux de Restless Idylls comme une bonne nouvelle de la pomme d'amour entre les dents.

Sauf que cet album est un des plus sombres du monde. Je le déguste comme j'ai pu déguster des albums de Joy Division, Crystal Stilts ou encore Still Corners. Je pleure des litres de larmes, sans trop savoir si c'est la solitude, l'humiliation ou le pouvoir de vos chansons. Mon mascara dégouline, sur les roses de mes joues comme un chewing-gum usagé mais encore bien mou. Je frotte, je frotte. Les notes aériennes et tristes s'échappent du côté gauche, ou du cerveau reptilien, (Je ne me souviens pas ce que le plus bel homme de vendredi soir m'avait dit).

Restless Idylls est le moment opportun, de ces longs soirs hyper humides et forts instables. L'album pour les gens profonds, pas forcément tristes. Qui mettent un petit point de gomme sur certaines histoires. Il faut dire ce que l'on pense, pas que dans ses rêves, quand on dort et qu'on prend le rôle des téméraires. Le chewing-gum revient se coller cette fois, dans mes cheveux. Ça me soule vraiment, parce que sur Children Of A Lester God, je me voyais plutôt faire un slow, avec moi-même, fort sensuel et moins lent que ces drôles de percus. Pas devoir décrasser tout ça, avec un peigne bien fin qui me fait mal. C'est l'amitié que tu me donnes ce chewing gum, tu vois ? Un truc que je pensais doux, qui est devenu glissant et qui maintenant, je souhaite qu’il soit impalpable.

Dans mes rêves d'hier et avant-hier, Tropic Of Cancer pouvait résoudre deux trois énigmes. Sur pourquoi les personnes sensibles souffraient tant, alors que finalement, les chewing gum roses c'est qu'une histoire de temps.

Les frissons que j'ai sur les bras et dans le dos, c'est à cause de ces chansons shoegaze et minimal wave girl. Je crois que ça devient un de mes albums préférés, et j'ai aucune envie de partager ça avec toi, gros chewing gum dégueulasse et pourri. (SA)

Tim Hecker – Virgins

A bout de souffle, la morve coulant jusque dans le foulard en soie, en laine, broder du noir, bredouiller des lyrics inutiles qui tomberont dans l’oubli des vents de face et des coups de klaxon par derrière. Les yeux remplis de larmes glacées, c’est la mélancolie sucrée, la première vague salée qui tombe au creux des lèvres et s’immisce dans ta bouche, seule cavité par laquelle respirer encore, en danseuse. Jouir d’être être d’émotion pris à l’insu de cette tristesse espiègle qui plonge lentement la main dans les cheveux à hauteur de nuque et pousse violemment sous l’eau la tête. Ne plus être capable de respirer, s’arrêter à un feu, et entendre des étudiantes arriver, hurler, puis passer sur le passage piéton, sur des talons hauts, ne pas savoir marcher. Pleurer sur un vélo devant une brochette d’étudiantes qui se moquent. Reprendre la route, prendre une voie sans issu, revenir sur ses pas, et recroiser ces filles délurées, plastifiées, menstruelles, hystériques, à problème, désengagées, casées pour la plupart sûrement, majeures tout juste, vierges de moi en tout cas. (CL)

FV = Fred Vio'o

SA = Steiger Amandine

CL = Charly Lazer

Islands – Ski Mask

Attention, si tu es allergique à la voix du chanteur de Maroon5, passe ta route et télé"chardge" le dernier Linkin Park. Autre option : pratiquer une cure de désensibilisation et se laisser porter par ce parfum Canada Dry, tout en hommage à la Brit-pop. Tantôt Oasis (sans les guitares viriles, il est vrai) comme sur "Becoming The Gunship", tantôt Blur avec "Winged Beat Drums". Le joli single porte-étendard "Shotgun Visions" pourrait avoir été écrit par les voisins d'Arctics Monkeys. C'est sucré comme une banane haribo : attention à l'écœurement comme sur "Nil" où les kids veulent nous montrer qu'ils ont assimilé le Lou Reed de Transformer ou le tout Velvet Underground façon bal-musette. 
Heureusement, nous écouterons en boucle "Sad Middle", qui est un des meilleurs titres de cette rentrée 2013, en bonne place sur notre Ipod et pour pas mal de semaines. Le sourire est donc au rendez-vous, mais ça sent quand même trop la javel de fin de concert ; et même si nos sympatoches Islanders livrent un  "Ski Mask" à la pertinence mélodique avérée, on aurait aimé un album moins daté 90's qui risque, pour cette raison, de passer à la trappe du temps et, attention, du présent, soit Novembre 2013. Eh oui, le problème de 2013, c'est qu'il y a de la rattaque niveau musical, presque trop... Pas de soucis, si votre papa aime les Beatles, il sera content de recevoir ce disque pour Noël, avec en prime l'impression d'être à la page. Pourtant des plages comme "Here Here" ou "Of Corpse" sont somptueuses, Coldplay n'avait qu'à apprendre à se tenir.  Pas un déchet ne vient donc ternir la trop bonne copie de ces drilles, qui gagneraient tout à faire leur Mai 68. Comme disait le grand sage Alain Manoukian pendant un casting de la Nouvelle Star : "Ça sent trop le savon et pas assez la foufoune". Mais on le droit d'aimer le gel douche à la vanille, non ? (FV)

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