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Hommage au Cd 2 titres

Planningtorock – All Love’s Equal

Cette année, Janine Rostron (devenue « Jam » par soucis de neutralité) a envie de danser. Et ça s’entend, et ça se sent. On avait déjà le coffre, les lyrics énigmatiques, les instrus émotionnellement puissantes, un charisme et tout un univers étranges.  Manquait plus qu’une bonne dose de beats électriques pour rendre ça complètement addictif.

 

Suivant les pas de ses copains de The Knife vers une musique de plus en plus électronique, pleine d’expériences et de rebondissements, la créature entre deux genres revient pleine d’inspirations que je la soupçonne d’avoir glanées sur les dancefloors des clubs caverneux de sa ville d’adoption, Berlin. D’ailleurs c’est aussi là qu’elle s’est trouvé plein de nouveaux collaborateurs et compagnons d’expérimentation, dont rRoxymore, Paula Temple, et plein d’autres, qui ont initié la musicienne de formation classique à la techno, l’air de rien. Prince(sse) androgyne armé(e) de son violon, Jam secoue.

 

Heureusement Jam n’oublie pas ses racines, et c’est sur ses instruments fétiches qu’elle nous ouvre son album, avec un appel à l’amour universel sans barrière et sans mensonge. Meilleur discours, car sincère et touchant, j’entends quelqu’un qui livre dans cet album ses espoirs et ses blessures. All Love’s Legal, est-ce qu’on parlerait de politique ?

J’en sais rien, mais en tout cas, elle, qui adoptait la technique du « restons vague et laissons les gens tirer leurs propres conclusions », n’a jamais été aussi directe. Patriarcat, misogynie, illusion des genres, barrière des sexualités, elle démonte tous ces fléaux un par un avec élégance, mesure par mesure, et sans argument. Ben non, pas besoin, avec une voix et des beats pareils, c’est si évident.


Quand on parle aussi bien à la fois à ma tête, à mes jambes, et mon bassin, moi j’appelle ça une expérience synesthésique et c’est tout mon corps qui plonge dans la musique.

 

Que dit la voix qui m’hypnotise ? Aimez-vous les uns les autres, flirtez, ondulez ensemble, échangez vos fluides. Dansez maintenant. Mysoginy Drop Dead (on the dancefloor).

 

Attention, cet album risque de vous donner envie de vous mélanger aux silhouettes ambiguës qui s’agitent et transpirent le soir. Parfois, au bar du discoklub, entre deux danses, dans la lumière tantôt bleue, tantôt rouge, tantôt noire, quand on me demande « Mais alors, tu es bi.. ? tu es… Tu es ? » au lieu de prendre un air exaspéré, je pense à toi et je réponds sans répondre, en prêchant ta sage parole sur la sexualité. “It's liquid, it's living, a moving love defined by itself. There's no rules, no convention.


Jam, tu es en avance sur notre époque, indubitablement. Il en faudra du temps pour que le monde se laisse porter sans lutter par les courants, dans cet océan agité de silhouettes mouvantes. Mais ça viendra, moi j’y crois. Il faut montrer l’exemple. Arrêter de baver sur des débats trop vieux pour nous, danser, et flirter avec son prochain qu’il soit garçon ou fille.

 
Le monde sera plus beau.
(SD)

Bvdub – I’ll Only Break Your Heart

Quelques part à l’ombre des monts BOF et RNB vit reclus un homme. Chaque année bi sexe style, nous quittons nos grandes villes pour le rejoindre dans sa maison top design : photovoltaïque, éolienne, énergie pure, paysage de carte postale qui a pris l’eau. Parfois il se peut que nous fassions un écart ; l’envie de sa présence bien qu’équivoque devenant pressante, nous le rejoignons au premier pont venu, quelques jours de vacances bien mérités. Vous voyez ? Bvdub est cet homme. Il est la vertu de la prolifération, je parie qu’il a une alimentation très équilibrée. Stricto sensu, il n’existe pas une musique ésotérique mais une musique divisée en plusieurs branches. On y puise ce que bon nous semble. Grand bien nous fasse. Ça peut passer aléatoirement par un temps d’adaptation que j’appellerais ici méditation ou apparaitre comme la prédication d’un miracle. Le temps d’apprivoiser son être, ses pensées, ce qui les contourne, et d’appréhender le meilleur comme toujours envisageable. Car ce qui rend le positif si cool, c’est justement qu’il est toujours là, quelque part, pas uniquement dans ce qu’on juge absurde et qui par principe n’a pas d’importance, mais aussi dans la rupture avec le factuel, prendre position doucement, lascivement, s’oublier, quelques fois par an. (CL)

Warpaint – Warpaint

L'album s'abandonne, il se tait. Maintenant, cette envie folle de faire l'amour. Douceur, sensualité, tendresse, des caresses. Des mèches de cheveux collants sur les épaules transpirantes, suintants les ébats amoureux qui paraissent trop éphémères. Il faut recommencer. Une puis deux, trois, une infinité de va et vient tout au long de cette route sinueuse. Los Angeles, warpaint. Embrasser les deux en même temps pour n'avoir que 70 ans. Courir sur les reins, descendre joue contre joue jusqu'aux cailloux. Ils se glissent dans les vêtements, petits objets dérangeants. On en avale, on en recrache, la nostalgie et les souvenirs des nuits passées. Le désir du présent et l'interdit des jours qui n'existent pas encore. Peut-être qu'ils n'existeront jamais. Warpaint, indie, Disco/very. Laissez-vous fantasmer. Délicate attention qui émane de vos regards, une sagesse pourvue d'émotions, une raison qui vacille sur le chemin horizontale des chevilles. Une langue qui se promène, de l'oreille jusqu'aux lèvres. Un gout délicieux de rivalité et de prix gagné. "Un bout de paradis" comme lorsque nous avions 16 ans. L'album favori romantique, Warpaint. Une rupture qui n'aura jamais lieu. Il faut commencer par une aventure. Interdite, malicieuse et brutale. Dans vos bras enlacés comme du chewing gum mâché. (SA)

Guerilla Toss – Gay Disco

Amateurs de flamenco, passez votre chemin. Ces drilles-là ne produisent pas n'importe quel bruit : ils possèdent l'art de le faire dandiner, et ce n'est pas donné à tous. Il faut évidemment une rage singulière, un truc dermatologique, pour arriver à faire frémir les guitares de cette manière - mais pas seulement, car si le morceau Gay Disco se justifie sous quelque spectre, c'est justement parce que le son y reste sexy de part en part. Comme s’il était enfermé dans une boîte de préservatifs qu’on ouvre le cœur battant, la peur au ventre de perdre en érection ce qu’on gagne en excitation. Evoquer Sonic Youth est une évidence ici. Pourtant, la veine de ces guérilléros boutonneux s’échappe et poursuit un chemin sans doute plus dans un esprit punk : car leur musique est militante, politique : car elle en-joint à y mettre de soi et la saveur d'une converse qui aurait passé une soirée dans une pinte de Lager. Ou l’inverse. Enfilez les bottes, oubliez la boue, nous sommes traversés par un souffle dionysiaque, mais dans une version cannabique et excentrée. Si ça, c'est pas politique... (FV)

Xiu Xiu – Angel Guts : Red Classroom

Ô Désespoir, je suis au bord du gouffre. Derrière moi la ville est un monstre géant. Devant cette piscine de cent mètres de long et sans une goutte. Je saute et me brise un os. Mal assis, je regarde ma cheville doubler de volume sur le carrelage bleuté et je sens le soleil venir au-dessus de ma tête la griller. Ô Désespoir. Une moto passe la grille et entre dans la propriété, je l’entends qui s’approche. J’entends les pas des bottes en cuir, j’entends le casque qui se retire et les cheveux qui se remettent en place. Je respire. Ô Désespoir. Une voiture stationne devant la maison, coup de klaxon et filles déchaînées claquent leurs talons aiguilles en pouffant. Je suis au milieu du désert et la rampe est là devant moi, le soleil s’y reflète et m’aveugle. Les filles ne sont pas loin mais je leur suis invisible. Elles parlent kinky, se servent des verres, mettent la musique, vivent leur vie en trémoussant leurs culs rnb, je ne sais pas combien elles sont. Un type parle à tout le monde un argot que personne ne comprend. Il gesticule. Et il dit action. J’ai toujours rêvé d’être acteur. Des individus s’embrassent. Je me concentre en fermant les yeux et en ravalant ma salive. Une fille dit « You’ve seen his cock ? » l’autre « have you ever sucked a black dick ? » Une fille gémit, des gifles se perdent au-dessus de L.A avec le soleil coincé au zénith, voyeuriste. Ca claque sur les joues, sur les fesses ; ça salive, sur les pieds, sur la bite, du motard. On fait la queue pour avoir sa dose de va-et-vient. On discute pour passer le temps en cherchant dans le paysage le fameux panneau. Quelqu’un l’aperçoit et hurle, j’ai l’impression d’être la seule âme d’Hollywood. Le type commence seulement à respirer. Je me dis qu’il en a encore pour une plombe, mais le voilà qui gémit à son tour. J’entends le silence précéder l’éjaculation. Tout le monde se tait, attentives elles tirent la langue. Une goutte atterrit près de moi. Près de ma cheville endolorie, une grosse goutte blanche. Tout le monde remonte en voiture. Le type boit un verre avec le producteur. Ils évoquent les couteaux et la botanique. Sa moto fait beaucoup de bruit. Il doit être costaud. Pourquoi appellerais-je à l’aide ? Je suis seul, sec comme un caillou. Bientôt il fera nuit. (CL)

Museum Of Bellas Artes – Pieces

J'ai manqué de délicatesse. Le vin blanc déclenche en moi le démon et je ne sais quoi répondre à ces mots qui me semblent décousus de sens. Dénudés. Dénudée aussi, ma nuque. Sous le poids de l'ivresse, elle est à cinq centimètres de la cuvette. Je m'approche de l'eau sale. Le morceau qui résonne c'est Twine. Twine, de Museum Of Bellas Artes, selon moi aux influences mi année 92, mi femme, mi sage. Je l'aime bien, mais malheureusement ça ne me fait pas rendre mon vin. J'aimerais entendre un peu plus fort ce que tu as à me dire, mais vraiment je ne saisis pas un mot. J'ai la main sur un poil pubien je crois. Je crois surtout que ça me déplait quelques secondes. Car de suite, la pochette de l'album Pieces est apparue comme une image subliminale. Derrière le nerf optique. J'oublie cette scène désagréable, et je me plonge une nouvelle fois la tête. Je m'amusais, et je m'amuse encore, seule dans la pièce. J'entends au loin "Relapse". J'espère que les invités vont la laisser en entier, pas comme quand il passe des morceaux pas encore terminés. Je me sens comme une pieuvre écrasée, dans mon monde d'eau et de javel. Mais c'est de ma faute, je me suis mise dans une situation de malaise. (SA)

Ejecta – Dominae

J’adore regarder les filles bâiller. C’est fou l’effet que ça me fait, comme cet album d’une extrémité à l’autre. C’est magique, surpuissant, ça m’adoucit, ça me rend plus robuste sentimentalement, prêt à affronter l’hiver. Et quand je suis au fond de ce bar avec mes potes mais que je m’y sens seul je pense à Leanne –la chanteuse et la fille nue sur la pochette-. Ça me rappelle sans nostalgie aucune cette époque où j’avais une amoureuse à Paris, c’était il y’a longtemps, on n’a jamais officialisé du coup c’était pas mon amoureuse mais j’étais amoureux d’elle, ça oui. Quand je revenais à Lille et que je me sentais seul, aussitôt je pensais à elle, et je me disais que je n’étais pas seul du tout, que j’étais le mec le plus chanceux du monde. J’avais même pas besoin d’aller regarder ses photos sur Facebook. Je crois que ça doit être de ça que parle le morceau Afraid Of The Dark, j’ai pas eu le courage d’aller chercher les paroles, j’avais peur d’être déçu j’avais pas le droit d’être déçu, mais c’est l’impression que ça me laisse sur le bout de la langue dès que je vous en parle. Ah oui, la langue des filles quand elles baillent. Ce n’est pas tant ça que l’expression chatoyante de la langueur qui me ravit dans cette contre action oisive. La foudre qui s’abat sur moi en pleine beuverie ; Elle à peine éclairée qui peine à lever la main jusqu’à la bouche, et je prie pour qu’elle ne dise pas «  bon les gars je vais rentrer me coucher » ; reste un peu, baille autant que tu veux, je ne jugerai pas. (CL)

SAD = Sophie Anna Demarcq

CL = Charly Lazer

SA = Steiger Amandine

FV = Frédéric Vio'o

 

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