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     Ce matin, ou plutôt cet après-midi, enfin bref, à notre réveil, il n’y avait plus de lait dans le frigo. Je n’aime pas trop ça, mais ma petite copine, capricieuse, commence à faire l’enfant et à se rouler  sur le canapé en petite culotte. Comment résister à son joli cul blanc ? Je me dis que c’est l’occasion de sortir de chez moi. Hier je n’ai pas fait la fête mais j’ai la gueule de bois. Ça fait combien de temps que j’ai pas mis les pieds dehors ?

Trop longtemps, aux dernières nouvelles il pleuvait des cordes. A peine après avoir quitté ma rue, je commence à transpirer. Plein soleil sur la ville. Ça faisait des mois.
Quelque chose a changé.  C’est dans l’air, là, pas juste la lumière ni la température, et ça me titille, il y a comme une petite musique qui trottine derrière moi, acidulée comme un néon indien.
Enfin.
J’ai tilté quand j’ai vu cette fille en vélo. J’ai d’abord aperçu un top bleu trop court laissant apparaître le haut d’une hanche, puis de l’autre, et les cuisses qui se contractent sous un short en jean à chaque coup de pédale. Elle a le front luisant, les joues brûlantes. Première vraie vision du printemps ; mes pieds arrêtent de marcher et tournent sur eux-mêmes pour que je puisse admirer la nuque humide qui s’éloigne. C’était donc ça.

La brique de lait pendouille au fond de mon plastique et  cogne ma cuisse un pas sur deux.  J’oublie qu’à force de suivre le creux doux des genoux de cette dame en jupe, j’ai déjà passé depuis longtemps la porte de mon appartement. Je me demande si c’est à cause de l’absence matérielle de limite entre ma main et sa culotte que j’imagine si bien mes doigts remonter le long de l’arrière de sa cuisse.

Souvent mon regard glisse aussi le long du cou des filles, étudie le mécanisme qui relie leur gorge, leur clavicule, la naissance de leur décolleté dans un schéma parfait. Chaque fois qu’elles s’attachent les cheveux est un lever de rideau, j’ai envie de leur dire merci et puis je me tais. Je les laisse continuer à boire leur bière comme si de rien, tandis que mon ivresse à moi a trouvé sa vraie source. C’est un fétichisme qui rend les soirées belles, quand elles se déhanchent et font rouler leurs épaules.

 

Ô Summer Sun.

 

Assise en terrasse, je bois un café et la forme des silhouettes qui ondulent sous les robes fluides. Des hommes passent et m’observent aussi, ils sourient à cette fille qui rêve seule face à sa tasse avec un air béat et une brique de lait aux pieds. Mais je n’ai d’yeux que pour vous, et la fraîcheur de cette peau découverte, redécouverte. Doucement je m’étire et c’est presqu’un onanisme en l’honneur de vos chevilles pressées qui gambadent sur le trottoir et vos fesses qui rebondissent sous les motifs aztèques.

J’essaie d’imaginer à quoi ressemblerait l’été sans les jambes des filles, il se sentirait sûrement seul et chaud pour rien.
Je me dis aussi que si j’étais un garçon je pourrais sûrement toucher la table avec ma bite à cet instant précis. Je suis émue.

 

Une nouvelle de Sophie Anna Demarcq

Un gif de Nina Cosco

 

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