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Xiu Xiu

Photo de Nicolas Djavanshir

Jamie Stewart est un homme dark dans l'ombre pourtant star inconstestée des indie kids du 21ème siècle, avec sa douzaine de disques et de déviances sexuelles il nous offre de passer avec lui un été de plus. Et ça tombe bien puisqu'il n'a pas sa langue dans sa poche et nous parle librement de famille, d'altruisme, de fêtichisme et surtout de chats. Un vent d'air frais depuis les ténèbres de l'âme humaine.

Han Han : Salut Jamie, c’est pas vraiment une façon drôle de débuter une interview, mais ça va mieux ?

Xiu Xiu : Oui, je me sens bien, c’est agréable d’être ici.

 

Han Han : Es-tu content d’être de nouveau en tournée dans l’Europe de printemps ?

Xiu Xiu : Le temps est plutôt beau, j’en ai eu vraiment ras le bol de tourner récemment, j’aime toujours jouer mais être en tournée plus vraiment. Du coup le beau temps, ça aide. Et en plus là où je vis, à Los Angeles, il doit faire 40°C.

 

Han Han : Est-ce que justement ta vie dépend des saisons et qu’est-ce que signifie l’été pour toi ?

Xiu Xiu : Pas particulièrement. La ville dans laquelle j’ai grandi est dans le désert alors l’idée de saison là-bas est très subtile et ça ne faisait pas office de repère dans ma vie. Il y a quelques temps je me suis installé dans le sud des Etats-Unis et là on sentait bien les saisons et leurs différences. C’était intéressant à observer car je n’avais pas grandi dans ce moule et que mon horloge interne n’était justement pas basée sur les saisons en particulier. Et sinon l’été pour moi, c’est les shorts. Porter des shorts.

 

Han Han : Et peux-tu me raconter un souvenir estival ?

Xiu Xiu : Ah oui. Il n’y avait pas trop de surveillance à la maison, c’est-à-dire pas trop d’adultes derrière moi, notamment en été, et parfois ça peut être mauvais car en tant qu’enfant tu as besoin qu’on te guide mais l’été c’était fantastique parce qu’avec les gosses du coin on se réveillait à pas d’heure, quand on voulait, et on sortait, on se baladait dans les environs, on allait jouer, on était partis pendant 15 heures et les parents n’avaient aucune idée de là où on était. Alors c’était un moment et une opportunité pour développer une vie dépendante et connectée à l’imagination. Je n’avais pas beaucoup de repère, du coup mon esprit d’enfant imaginatif pouvait aller à sa guise.

 

Han Han : Aimes-tu le soleil ?

Xiu Xiu : Oh. Je préfère sûrement avoir chaud qu’avoir froid, ça doit vouloir dire que oui.

 

Han Han : Je t’ai découvert il y a 9 ans, et je ne sais pas pourquoi j’ai cru que tu étais un chanteur de folk. Ensuite j’ai bien sûr révisé mon jugement. Est-ce que tu aimes quand les gens sont perdus ou désorientés, un peu comme quand tu regardes le soleil dehors et puis que tu rentres chez toi ?

Xiu Xiu : Je ne me suis jamais dit qu’il fallait que je dirige l’opinion des gens dans une direction. J’apprécie le fait que tu ais pensé qu’on était un groupe folk pour ensuite changer d’avis un peu. J’aime bien me dire que les gens n’ont pas la même idée de Xiu Xiu que l’idée que je m’en fais. Moi j’ai une idée claire et précise à propos de ce projet.

 

Han Han : Ce qui est marrant c’est que j’ai réalisé que pas mal de tes albums commençaient par des gimmicks folk, comme juste une guitare sèche.

Xiu Xiu : Oui, la musique folk a été très importante pour moi. Mon père et mon oncle étaient tous les deux des musiciens folk célèbres alors j’ai un peu ça dans le sang.

 

Han Han : Parlons un peu si tu le veux de tes dessins de chat (Jamie a dessiné 100 chats et déclaré que s’il les vendait tous, il s’achèterait un beau pistolet et se tuerait). Mon coloc Gilles de Shiko Shiko avec qui vous jouez ce soir m'en a parlé, ça nous a fait marrer, même si c’est une triste histoire. Comment je fais pour en acheter ? J’ai envie que tu vives pour toujours, mais ça m’embêterait de savoir que d’autres personnes les auront alors que toi tu seras parti.

Xiu Xiu : Les chats ne s’achètent que dans un set de 100. Tout ce que tu peux faire c’est tous les acheter. Et ça coûte 20 000 dollars.

 

Han Han : T’aurais pu demander plus je pense.

Xiu Xiu : Je ne sais pas, c’est pas encore vendu, je suis encore en vie, alors on verra.

 

Han Han : Te sens-tu altruiste puisque tu aides les autres à se sentir mieux et ce avec ton désespoir ?

Xiu Xiu : Tu sais, la musique est une chose altruiste. Ca n’a rien avoir avec moi, mais seulement avec le fait que la musique puisse faire ressentir des choses fabuleuses à d’autres personnes et devient une autre entité pure et altruiste par la même occasion. En tout cas c’est comme ça que ça fonctionne chez moi en tant que fan de musique. Et ce que je veux dire c’est que le but du groupe est que d’autres personnes puissent en extraire quelque chose, mais c’est pas comme si on contrôlait quoi que ce soit. De plus je crois que parmi tous les médiums artistiques, et parce que ça peut être simultanément physique, intellectuel, émotionnel, visuel, esthétique, la musique a le plus gros potentiel de toucher les gens.

 

Han Han : Considères-tu ton nouvel album « Angel Guts : Red Classroom » comme sombre ?

Xiu Xiu : Pour moi il l’est, mais chacun peut le voir comme il l’entend.

 

Han Han : Alors peut-on dire que la pornographie est sombre ?

Xiu Xiu : Oh, oui je pense que ça peut l’être, mais en même temps je pense pas que ce soit particulièrement un album pornographique. Tu sais, le sexe en général peut être incroyablement sombre. Mais bon c’est pas le même genre de sombre. Et puis un des thèmes les plus intéressants c’est le sexe, et justement avec ce parallèle qu’on peut faire avec la musique vue comme un lien entre ce qui est physique, intellectuel, émotionnel surtout. Et puis dans ce monde t’as le pire et le meilleur du sexe, tout comme tu as de la très belle musique et de la musique vraiment merdique.

 

Han Han : Es-tu un fétichiste ?

Xiu Xiu : Oui ! (il rit)

Mais je n’avouerai jamais quel est mon fétichisme, jamais de la vie. Mais oui, j’en ai carrément un.

 

Han Han : et le fétichisme c’est plus une question de curiosité ou de perversité ?

Xiu Xiu : Je crois que ça dépend de la personne. De mon côté ce n’est plus une question de curiosité, c’est vraiment devenu une question d’obsession et de perversité. Et franchement, je n’en suis vraiment pas fier. Pourtant je ne fais de mal à personne. Mais bon je ne me sens pas bien, sinon je ne refuserais pas d'en parler. (Il rit, il a l'air bien en fin de compte)

Cet entretien a eu lieu le 15 mai à la Malterie, Lille avec Charly Lazer

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