top of page

Photo by Martin Sorrondeguy

Han Han : T'es plutôt unique dans ton genre, peux-tu nous conter ton parcours musical depuis son commencement ou du moins tes premiers souvenirs? Peut-on dire que tu viens du rock lofi et que tu glisses doucement vers les profondeurs de la techno avec tes bagages sur le dos?

 

Michael Kasparis : Je te remercie. Ce qui compte vraiment dans mon “parcours musical” c'est qu'il a été guidé par l'instinct. Vu mon âge on pourrait imaginer que j'ai toujours baigné dans la techno ou les musiques électroniques, mais en ces temps modernes j'ose croire que les gens ne sont pas si dogmatiques, pour moi le dogme et les visions étroites sont ce qu'il y a de pire. Mon plus vieux souvenir? J'étais gosse, ma mère s'occupait d'un club à la fin des années 80, du coup j'ai fêté mon 9ème anniversaire dans une boîte de nuit, avec des glaçons, des miroirs, un univers très adulte où, la nuit, devaient sûrement se passer des trucs d'adultes. Elle jouait souvent des trucs de Technotronic, d'Ace Of Base et beaucoup de musique soul de l'époque. C'était donc les premiers trucs que j'ai aimés. Après sont venus le reggae, l'Uk Garage, le Dancehall, des musiques ensoleillées si tu vois ce que je veux dire. La première fois que j'ai entendue du vrai rock, ça devait être Iron Maiden ou Guns n' Roses. J'ai eu les jetons. Après ça, j'ai déménagé au Royaume-Uni et je me suis plongé dans Nirvana et la musique punk; Je me sentais à la ramasse et cette musique me donnait l'impression que quelqu'un d'autre comprenait enfin comment je me sentais. C'était en tout cas quelque chose de très adolescent mais ce genre de trucs est essentiel pour le développement de ta personnalité. Du coup ouais, lorsque j'ai débuté la musique, c'était de l'amateurisme, pas de thune, pas de véritable instrument, c'était lo-fi par nécessité. Quand je me suis mis à la musique électronique, ce n'était qu'une suite logique, et je conservais cette approche, c'était une façon d'exprimer les mêmes choses de différentes manières.

 

 

Han Han : Est-ce que ta musique est virile? Dans quel sens le serait-elle et dans quel sens ne le serait-elle pas?

 

Michael Kasparis : Ca arrive que je m'inquiète en me disant qu'elle l'est de trop. Mais c'est pas du machisme, plutôt un excès de testostérone en apparence : Pour moi c'est viril car ça se connecte avec le mouvement, l'énergie, la productivité, l'expression... Mais je crains parfois que la virilité soit mal comprise et confondue avec quelque chose que je rejette, considérée comme une agression manifeste. Il y a une forme d'agression dans la musique, mais c'est au sens de l'énergie et de l'utilisation qu'on en fait pour exprimer ce qui n'est pas toujours facile à exprimer. Je m'intéresse beaucoup à l'énergie et à l'activité, mais aussi à la virilité jusqu'au moment où ça devient trop genré. L'idée d'une “virilité masculine”, je la trouve très problématique. Alors ce que je suis en train de dire c'est que j'essaie de prouver que ma musique est virile tout en y soustrayant la masculinité qui se cache dans sa sémantique, et dès lors je suis très heureux ah ah.

 

 

Han Han : Le nom de ton dernier disque explique ma dernière question. Virile Strain Transmission. Très joli jeu de mots. Peux-tu nous expliquer ce titre?

 

Michael Kasparis : Et bien ce nom est un peu abstrait et vient de VST, un acronyme se référant au fait de jouer de la musique sur des ordinateurs. J'ai donc cherché plusieurs mots pour coller à cet acronyme et à chaque fois ça se référait à des trucs auxquels je m'intéressais. La Virilité comme décrite plus haut. Les Souches : je m'intéresse aux maladies, aux germes, surtout car j'aime les esthétiques issues de la microscopie. La Transmission est un mot chargé de sens. J'imagine que j'ai joué avec ces mots mais j'aime l'idée de “transmettre la virilité” qui est je crois ce que j'essaie de faire avec la musique. Ce qui est peut-être un peu maladroit.

 

 

Han Han : T'es le seul Homme à bord de Night School Records? Quand as-tu eu l'idée de monter un label? Tu voulais faire ça différemment de ce qui se faisait alors?

 

Michael Kasparis : Ouais, Night School c'est moi mais j'ai plein de potes qui m'aident. J'ai commencé parce que j'étais pas très bien dans le monde, dans mon monde, et je désirais créer quelque chose de positif. J'avais besoin de focaliser mon énergie sur quelque chose. J'avais aussi besoin de prendre en main mon existence. Basiquement j'en étais à un point critique de ma vie, j'ai vendu ma collection de disques et j'ai parié sur ce label, tout ce que j'ai fait a été un enseignement, j'ai fait pas mal d'erreurs ah ah. Ca faisait déjà 15 ans que je faisais de la musique. Night School vient d'avoir 5 ans et si je l'ai créé c'était pour sortir la musique qui avait un sens pour moi et qui ne sortirait peut-être jamais de la même façon ailleurs. Y'a un tas de labels qui m'ont inspiré et la passion que mettent ces gens dans la musique qu'ils éditent est quelque chose qui nous lie. Une chose qui me débecte c'est la façon qu'ont certains labels, dès lors qu'ils ont un peu de succès, d'étouffer d'autres voix qui pourraient grandir à leurs côtés, et du coup les voies médiatiques par lesquelles des gens entendent parler de nouvelles musiques se font écraser par la même pourriture qu'on trouve partout ailleurs. On peut donc dire que je m'attache aux alternatives dans tous les pans de mon existence ah ah.

 

 

Han Han : J'ai lu que même à la tête de Night School, tu es un musicien avant d'être un homme d'affaire. Tu crois que parfois le biz nique la confiance qu'on peut porter aux musiciens et aux structures supposées les aider? Pour moi, tous ces gens qui considèrent la musique comme un job classique perdent souvent l'essence du truc. Les hommes d'affaire ignorent donc tout?

 

Michael Kasparis : Complètement, plus qu'un homme d'affaire, je suis avant tout un musicien. D'ailleurs je suis un horrible homme d'affaire. Certaines sorties du label sont des réussites, ce qui est cool, mais si j'étais un meilleur homme d'affaire je ferais un peu d'argent, ce qui n'est pas du tout le cas. Je n'arrive pas à prendre des décisions basées sur le business : Parfois ça coule de source et j'ai un bon sens des affaires mais c'est souvent par accident. Pour moi, t'as raison à propos du business autour de la musique. Tu sais, ça arrive que j'en arrive à avoir plus de respect pour les grosses usines de l'industrie, les grosses majors bien corporate parce qu'au moins elles sont honnêtes. Universal sort un disque de David Bowie par exemple, ils le font pour faire de l'oseille, payer leurs employés et la plupart du temps ils ne disent pas faire autre chose que produire ce qui répond à une demande, dans un marché de l'offre et de la demande, que les gens vont consommer. Ensuite, pour ce qui est de “niquer la confiance”, c'est vrai avec beaucoup de ce qu'on croit être des labels indés, certains étant juste des majors en devenir, fondés par des mecs qui viennent d'ailleurs, et financés par des partenaires et du sponsoring. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des gens vraiment passionnés qui bossent dans ces maisons mais ils n'arrêtent pas de gueuler qu'ils sont DIY pour à la fin de la journée ne prendre aucun risque parce que s'ils sortent 2, 3, 4 disques qui ne se vendent pas ils vont devoir licencier du personnel. Pour ma part, j'ai un job alimentaire alors si 3 des disques du label me font perdre de l'argent je n'ai plus qu'à arrêter de boire de l'alcool pendant quelques mois, et manger des lentilles ah ah. Je trouve ça dingue que des gens aillent dans des universités pour étudier la musique comme un “job habituel” mais ouais ça existe. Bien que des gens nous aiment toi et moi, nous faisons rien d'autre que ce que nous faisons et apprenons de nos erreurs ah ah. Désolé pour cette longue réponse, c'était quelque chose qu'il me tenait à coeur d'évoquer.

 

 

Han Han : L'apostille c'est une chose discrète qui prouve l'honnêteté de la personne qui écrit. T'es discret? L'honnêté est-elle la clé?

 

Michael Kasparis : Je vois ce que tu veux dire. Je crois qu'Apostille évolue dans ce respect. Je veux dire que la performance live est devenue très extravertie, "dans-ta-face", mais que c'est basé sur l'honnêteté. J'essaie d'être le plus authentique possible, j'essaie de transmettre quelque chose d'universel. Le label d'un autre côté n'est pas à propos de ma personne. Je n'y suis vraiment qu'un co-ordinateur et j'ai envie qu'on porte toute notre attention sur les artistes qui le composent. Alors oui, on peut dire que je suis discret de côté-là ah ah.

 

 

Han Han : Quels sont les trucs les plus sensuels que tu ais ressentis récemment?

 

Michael Kasparis : Y'en a beaucoup en fait! En ce moment je me trouve dans un bel espace de vie. Je suis toujours très stressé mais là, depuis quelques mois, j'ai essayé de me détendre. J'apprends à me relaxer et prendre plaisir de me trouver dans mon corps. Je me suis mis à songer à faire des activités physiques : j'ai débuté le yoga, c'est sensuel d'une certaine façon. On peut dire que c'est émotionnellement sensuel? Sûrement que le truc le plus sensuel que j'ai vécu ces derniers temps c'était d'être amoureux et de découvrir la sensualité dans ce paradigme mais c'est peut-être une réponse d'un autre temps...

Han Han : You look pretty unique, can you narrate your musical path since the beginning or at least the first memories you have? Can we say you come from lofi rock music and go deeper into techno with all your luggage on your back?

 

Michael Kasparis : Thank you. I think the most important thing for me with my ‘musical path’ is that it was guided by instinct and how I felt at the time? I think I’m the age that means I could have always been into techno or electronic music, but I think in modern times people are not so dogmatic and I think dogma and tunnel-vision is the worst thing. My first memories of music is being a child, my mother used to run a night club in the late 80s, so my 9th birthday was in a night club, with dry ice, mirrors, a very adult space where probably adult things happened at night. She used to play Technotronic, Ace of Base and a lot of 80s soul music, so that was the first music I loved. Then reggae, UK Garage, Dancehall, a lot of “sunshine” music, you know? When I first heard any real “rock” music it was probably Iron Maiden and Guns n’ Roses, which scared me and I found that really thrilling. From there, I moved to the UK as a teenager and got into stuff like Nirvana and punk music: I suppose I felt like an outsider and that sort of music made me feel like someone else knew what I was feeling? It was a very teenage thing, but those things are really important for people’s development. So yeah, when I started playing music it was as an amateur, no money, no real gear, so it was lo-fi by necessity. When I started making electronic music it was an extension of that and I approached it the same way, it was away of expressing the same things in different ways.


 

Han Han : Is your music virile? In which ways it is and in which ways it is not?

 

Michael Kasparis : I sometimes worry that it is too virile. But not in a macho way, like full-on hard-on music: I feel like it’s virile in that it is concerned with movement, energy, productivity, expression, all that stuff. But I worry that it comes across as one-sided and virility can be mistaken for some things which I don’t like, like overt aggression. There is definitely “aggression” in the music, but it’s about energy and using the energy to express things which are often not expressible in every day language. I am interested in energy and activity and virility too but as long as it is not overtly gendered. The idea of “male virility” I find really problematic. So I think what I’m saying is that if I can call the music virile but subtract the implicit masculinity in the term then I would be happy haha.


 

Han Han : The name of your latest release is the reason of the question above. Virile Strain Transmission, can you tell the story of this name? It's a funny pun anyway! 

 

Michael Kasparis : Ha well, the name is kind of abstract and based on a random acronym - VST means Virtual Studio Technology and refers to making music on computers. I wanted to put different words to the acronym and the words all referred to things I was interested in. Virility, as described below, Strains: I’m interested in diseases, germs but mostly because I like the aesthetics of the microscopic world and Transmission is such a loaded word. So I suppose it’s a play on a few words but also I like the idea of “Transmitting virility” which I suppose what I try to do with music. It’s probably a bit lame..


 

Han Han : Are you the only Man behind Night School Records? When did you get the idea of starting a label, did you want to make it different from other ones, and what happened then?

 

Michael Kasparis : Yeah, Night School is me but I have a lot of friends who help. I started the label because I was in a bad space, in my personal circumstances and wanted to create something positive, I needed a focal point to concentrate my energy. I needed direction in my life so I decided to create my own direction. Basically I was at a crisis point in my life, so sold a lot my record collection and made a gamble on the label, learning with everything I did, making a lot of mistakes haha. I had been playing music for like 15 years before starting the label, 2016 is the 5th year of Night School actually, and I started the label to release music that meant something to me that maybe wouldn’t be in the world in that form otherwise. There are many other labels that I took inspiration from and the passion those people have in the music they release is something I have in common. I am interested in getting across the point of the view of the label but staying outside as much bullshit as I can.. one thing I hate is the way that labels, once they get success, have to start smothering out other voices so they can grow, so the media outlets and the channels by which some people hear about new music get crowded with the same mainstream crap that is everywhere else. So I am interested in alternatives in all walks of life haha.


 

Han Han : I read that even at the head of Night School, you are more a musician than a businessman. Do you think business is sometimes fucking up the trust we can have in musicians and structures which are supposed to help them? To me, some people considering music as a proper job are losing the spirit of it. Businessmen have no idea of how it works?

 

Michael Kasparis : Definitely more of a music player than a businessman. I am a terrible businessman. I mean sometimes there are releases on Night School that are successful, which is cool, but if I was a better business man I would be making money, which I am definitely not. I cannot make decisions based on business: sometimes the decisions make good business sense, but that is usually an accident. I think you’re right about business getting in the way. You know, I sometimes have more respect for mega mega record labels, big corporate labels, because they are kind of honest? I mean, Universal release a David Bowie record for example, they do it to make money, to pay their employees and they often don’t really pretend it’s anything else: they are producing a product in a supply and demand market and people consume it. But in terms of “fucking up the trust” I think this is true with a lot of what we think of as “indie” labels, bigger indie labels that are actually just corporate labels in training, often funded by outside sources, sponsorship etc. I’m not saying there aren’t people who are not passionate in places like that, but they try to pretend they are DIY or whatever you want to call it but at the end of the day they don’t really take any risks because if they make 2, 3, 4 records that don’t sell they have to start making people unemployed. For me, I have a day job so if I have 3 records that lose money in a row I just have to stop drinking alcohol for a couple of months, eat lentils for a few weeks haha. I find it crazy people go to college to study music as a “proper job” but people definitely do it.. whereas people like me and you, we just do what we do and learn by mistakes haha. Sorry for the long answer, it is something I am still angry about!


 

Han Han : The Apostille is a discrete thing but proves the honesty of the person writing. Are you a discrete person? How is it possible for a discrete person to lead such a label as Night School? Honesty is the key?

 

Michael Kasparis : Yeah, I see what you mean. I think Apostille is changing in that respect, I mean, the live performance has become really outgoing and non-discrete thing, in-your-face but it’s all based on honesty, I think. I’m trying to be truthful, trying to communicate something that’s as universal as I can make it. The label on the other hand isn’t about me. I’m really just a co-ordinator and I feel like, with the label, I’d like as much attention to be on the artists as possible, so hopefully I can be a little bit discreet in that department haha.


 

Han Han : What were the most sensual things you felt recently?

 

Michael Kasparis : A lot actually, haha. I am in a good place at the moment. I am usually quite stressed but in the last couple of months I have tried to relax, I am learning to relax and enjoy being in my own body. I have become a lot more interested in physicality: frequent exercise, I started some yoga which was sensual but in a different way, like emotionally sensual? Probably the most sensual thing I felt recently was being in love and discovering sensuality in that respect but perhaps that is a answer for a different time…

Interview réalisée par Charly Lazer

 

bottom of page