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Un article d'Angèle Waffle

Encore un vieux pervers fan de hentaï, qui met des caméras microscopiques sur ses chaussures pour filmer sous les jupes des étudiantes?

Bon Dieu, non. Un grand cinéaste, certes japonais donc un peu chtarbé sexuellement, décédé il y a trop peu, dont la confusion et le trouble sont les maîtres mots. Une forte tête pas forcément appréciée de tous. 

On connaît Nagisa pour son touchant Empire des Sens. Un film dont le scénario paraîtra complétement banal à un bon nombre d’entre vous ; une fille de joie qui devient une domestique, et l’employeur en devient dingue. Une histoire d’amourette, de cul, de mignon ; la soubrette et le patron, la secrétaire et le big boss, l’élève et le prof de maths. Un mauvais scénario Dorcel en soi.

Oui mais non. C’est plutôt l’histoire impossible d’une fille de basse condition qui entretient un amour illusoire avec un patron perdu entre sa propre femme et cette mignonnette, et d’autres jolies minettes.

L’empire des sens relève d’une question malgré tout encore actuelle, bien que le film ait été réalisé en 1976 : celui du sexe anti-sentimental. Le plan cul, revisité, ou plutôt abordé sans le savoir. La maîtresse, l’adultère, la confusion des sentiments, amour du sexe ou amour vs. sexe ?  La passion. La passion, car d’aventure risquée, les deux personnages deviennent fous d’amour l’un pour l’autre, puis fous tout court. Mais entre temps, ils décident surtout d’être libres, et de continuer leur chemin sinueux et sulfureux de perversion. Mauvaise idée, car de là naît la jalousie. Ah, la jalousie. Pas très malin de s’essayer au libertinage quand on est jaloux. C’est ce péché qui donnera le fin mot de l’histoire. Le possessif n’est jamais heureux.

L’empire des sens, c’est, avant tout, la sublimation de l’érotique. L’érotisme dans toute sa splendeur, vu avec un regard ambitieux et espiègle, c’est doux, c’est dur, c’est touchant, c’est un peu triste et excitant, une tonne et demi de frétillements dans la culotte, une tonne et demi d’idées absurdes pour mon rendez-vous demain avec Machin. Le moteur de la relation entre la jolie Sada et le vieux Kichizo, c’est le désir, sa stimulation, le plaisir, la volupté. La lâcheté de l’un et de l’autre renforce plus encore l’atmosphère malsaine et perverse, dans tous les sens du terme, de leur relation. Sada, sacrée allumeuse. Kichizo, méga vicieux. Et ça se court après, et ça s’assouvit les désirs à droite et à gauche pour rendre fou l’autre, et ça finit mal.

Cette histoire-là nous parle un peu, n’est-ce pas ? Tu me baises et je te veux, mais je ne le dis pas. Je t’envoie une photo de mes seins, et toi de ton gland, mais on ne se voit pas. Tu me mets un doigt et je repars sans même t’avoir embrassé une seule fois. Tout ça. Ça finira mal. Je vais te punir. Tu ne me verras plus. Mais je reviens quand même, tu lèches bien. Le serpent qui se mord la queue.

C’est arrivé à tout le monde. « Je l’aime bien, quand même ».

Nagisa nous a quitté début janvier.

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